Olivier Marchal n’est pas un “mec” comme les autres. Il a son franc parlé et un humour incisif qui lui valent souvent d’être controversé. Qu’importe, il lui en faudrait bien plus pour être déstabilisé. Mais si le réalisateur est un génie du polar français, l’homme en revanche est torturé, à fleur de peau. Et le personnage attachant. L’oeil malicieux, édoniste, spontané et sincère… A l’occasion de la sortie des “Lyonnais”, et avant la reprise en tournée de “Pluie d’enfer” dès le début 2012, il accepte de se dévoiler en toute humilité.
J’ai lu que votre père était amateur de roman noir, est-ce cela qui vous a donné envie de rentrer dans la Police ?
Olivier Marchal : Oui, en tout cas pour une part. Et puis il y a également eut la découverte de Chandler, de Goodis et de Jim Thompson et de cet univers très noir peuplé de loosers qui sont les héros de cette littérature américaine, et surtout, la découverte de San Antonio qui fut une vraie révélation pour moi. La plume de Fréderic Dard est phénoménale, et ma maîtrise de l’argot, ma façon de parler me viennent beaucoup de là.
Que gardez vous de vos « années police » ?
Olivier Marchal : Pas grand chose, si ce n’est un profond mal-être. J’en garde aussi beaucoup de solitude, de névroses. C’est un métier où l’on est seul, ce qui m’a sans doute amené à créer mon monde.
Vous avez quitté la police pour vous consacrer au cinéma. Tout d’abord comédien, puis réalisateur, qu’est ce qui vous à menez à cela ?
Olivier Marchal : Ma rencontre avec le théâtre date de ma classe de 4e. C’est ma prof de français qui m’y a poussé. J’ai alors découvert Labiche, et aussi que les filles vous regardaient davantage lorsque vous étiez sur scène. Par la suite, ce sont des films comme « Itinéraire d’un enfant gâté » de Lelouch qui m’ont décidé à franchir le pas. Une érosion s’était produite en moi, trop de sang, trop de violence, trop de chagrin… Je suis dans le fond quelqu’un de trop sensible même si j’aimais aussi ce que je faisais car cela m’excitait et me donnait vraiment l’impression d’être un mec couillu.
Qu’est ce qui vous a décidé de passer derrière la caméra ?
Olivier Marchal : Le hasard car personne ne voulait réaliser « gangster » mon premier film, dans lequel je souhaitais juste jouer, n’ayant à ce moment là pas de velléité de metteur en scène. Ce fut un challenge… que j’ai adoré relever !
Que vous apporte la réalisation que vous ne trouvez pas dans le jeu d’acteur ?
Olivier Marchal : Je me sens utile. Je me sens créateur, chef d’équipe. Lorsqu’on est acteur, on est seulement ce que l’on vous demande d’être avec plus ou moins de talent. En ce qui me concerne j’ai surtout l’impression de faire mon métier d’acteur au théâtre, devant une caméra les choses sont différentes… L’attente est souvent longue.
Vous écrivez et vous réalisez vos films, est-ce important pour vous ?
Olivier Marchal : Primordial dirais-je. J’ai besoin que l’histoire m’appartienne. Mais un jour peut-être m’enverra-t-on une histoire que je ne pourrai refuser.
On retrouve souvent les mêmes acteurs dans vos films, avez vous besoin de travailler en famille ?
Olivier Marchal : Oui parce que cela me rassure. Je sais que je leur fait plaisir car ils aiment tourner avec moi et moi, je suis heureux de les savoir là. Je préfère faire plaisir aux gens que j’aime, plus qu’à un comédien que je ne connais pas et qui même s’il est bon n’aura au final rien à partager avec moi. Vous savez, je fait ce métier sérieusement, mais surtout sans me prendre au sérieux… chose de plus en plus rare et qui à petit feu tue le cinéma français.
Vos films tournent tous autour de la police, c’est je suppose une source inépuisable d’inspiration pour vous ?
Olivier Marchal : Inépuisable, c’est le mot… Mais il va falloir qu’un jour où l’autre j’en divorce. J’aimerai écrire une comédie. Mon rêve serait de faire un « Vincent, François, Paul et les autres » mais version actuelle. Parler de la vie et des préoccupations des 40-50 ans sans faire de la guimauve.
Parlez nous “des Lyonnais” qui est a l’affiche actuellement ?
Olivier Marchal : C’est un film de voyous et non de flics. Il est donc traité très différemment, ce qui m’a à un certains moment posé un problème moral, même si Edmond Vidal le voyou dont je parle est un super mec, très attachant. C’est un grand monsieur, qui je peux le dire est devenu mon ami. Ce fut un film très compliqué à réaliser. Et c’est aussi mon film le plus cher donc la pression en est d’autant plus forte.
Qu’est ce qui vous a donné envie de faire ce film ?
Olivier Marchal : Ma rencontre avec Edmond Vidal. Et historiquement, il est considéré comme étant le chef de fil du banditisme. Jeune flic, j’ai toujours entendu parler de lui… Il me faisait briller les yeux. Et j’ai rencontré un homme qui est dans l’hyper sensibilité, pas du tout dans l’arrogance. Un homme qui a des valeurs et dont le parcours est incroyablement passionnant. Un homme qui assume ses erreurs et que j’ai vu pleurer en me racontant son histoire… C‘est ce qui pour moi a fait la différence. Cela m’a plu. Et puis il m’a fait confiance.
Vous dites souvent que sans votre épouse Catherine vous ne seriez jamais arrivé là où vous êtes …
Olivier Marchal : Absolument. Je lui dois tout… ou presque (rires). Elle me supporte depuis 20 ans et ce dans tous les sens du terme. Elle est cash avec moi, ne me fait pas de cadeaux. Elle est mon repère. Ses jugements sont souvent sévères mais toujours justes. Dans 95% des cas elle a raison sur ce qu’elle me dit. Ce qu’elle fait, elle le fait par amour. Je pense que les mecs qui partent en vrille sont souvent pas accompagné ou mal accompagné… et moi je suis très bien accompagné.
Vous semblez être un éternel insatisfait, c’est sans doute ce qui vous pousse à vous dépasser, mais pour autant y a-t-il des moments où vous vous trouvez « bon » et où cette insatisfaction vous lâche un peu ?
Olivier Marchal : Cela arrive en effet, mais par petite bribe lorsque par exemple je vois ma femme heureuse et que j’ai le sentiment d’y être un peu pour quelque chose. C’est fulgurant ! L’alcool m’aide également à dissiper cette insatisfaction chronique… et ce mal-être qui ne me lâche jamais.
Qui est Olivier Marchal à la ville ?
Olivier Marchal : Quelqu’un de très complexé, de timide, de très révolté. Qui déteste le genre humain mais qui aime les gens, ce qui souvent est un vrai problème. Quelqu’un aussi qui ne voulait pas d’enfants et qui en a 4. Qui ne voulait pas se marier et qui l’a… Bref… je suis pleins de contradictions et de paradoxes.
Qu’est ce que la notoriété a changé dans votre vie ?
Olivier Marchal : Ma perception des choses, me rendant ainsi plus parano et plus auto-destructeur … mais par phase.
Comment vous protégez vous ?
Olivier Marchal : Sans doute en ayant recours à certains excès !
Le dernier Film d’Olivier Marchal “Les Lyonnais”, sorti le 30 novembre 2011, est actuellement diffusé en salle.
Lien AlloCine http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=145068.html
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