La vengeance est un plat qui se mange froid. Et ce n’est pas Xavier Leroux qui dira le contraire avec son livre « L’Affaire Le Landec »*. Ce journaliste de La Nouvelle République du Centre-Ouest à Niort, signe son premier roman noir publié par La Geste éditions. Une première réussie pour ce polar mêlant journalisme et politique. Une idée de lecture pour ce second confinement. Rencontre*.
LCV Magazine : Vous signez votre premier roman. Quelle est l’intrigue ?
Xavier Leroux : C’est l’histoire d’une humiliation subie par un journaliste, qui le pousse à vouloir se venger d’un élu. Sauf qu’il se rend compte qu’il n’a pas les moyens intrinsèques de mener lui-même sa vengeance. Donc il fait appel à des subterfuges, à quelqu’un d’autre qui va mener l’action à sa place.
LCV Magazine : De quoi vous êtes-vous inspiré pour cette histoire ?
Xavier Leroux : Je me suis inspiré d’une interview de Jean-Luc Mélenchon, réalisée il y a quelques années. Plus généralement, je ne le trouve pas toujours très tendre avec nos collègues journalistes. Quand ce sont des journalistes bien armés, je considère que c’est le jeu : celui du débat et du face à face. Sauf que dans ce cas précis, c’était une interview en extérieur menée par une journaliste qui a dû lui poser une question qu’il a considéré comme idiote, mais peu importe. Il lui a répondu comme de la « merde », comme une moins que rien. Il l’a vraiment mise sous terre. Et j’ai vu le visage de cette journaliste. Elle s’est complètement décomposée, et a perdu ses moyens. Je me suis tout de suite demandé comment je réagirais si ça m’arrivait.
LCV Magazine : Justement, vous êtes vous déjà retrouvé dans ce genre de situation ?
Xavier Leroux : Je vais vous donner un exemple étonnant parce que je me retrouvais en face de quelqu’un que j’adorais. C’était le chanteur Hubert Félix Thiéfaine que j’interviewais pour la première fois après un de ses concerts. Il était hyper mal luné, a été très désagréable et m’a fait comprendre que mes questions n’étaient pas intéressantes pour lui. Après le problème, c’est que c’est le cercle infernal car on n’arrive plus à s’en sortir. On bafouille, on pose des questions plus nulles les unes que les autres, etc. (rires) Avec un peu d’expérience, je pense qu’on arrive à retomber sur ses pattes. Même si on est à côté de la plaque, ce qui m’arrive bien souvent (rires), on arrive à se rétablir.
LCV Magazine : Écrire ce livre était-il un moyen de mettre en lumière le travail des localiers ?
Xavier Leroux : Pendant très longtemps j’avais le sentiment que la presse quotidienne régionale était dénigrée. On la voyait comme de la petite presse qui reposait sur du clientélisme avec les élus locaux, ce qui est entièrement faux d’ailleurs. Ça fait 27 ans que je fais ce boulot et je n’ai jamais été cul et chemise avec les élus. Ça ne m’est jamais arrivé. J’ai l’impression que maintenant cette presse est moins critiquée. Ce qu’il faut savoir c’est qu’on a une certaine indépendance par rapport aux grands médias nationaux. Je n’ai jamais fait relire mes articles avant parution par exemple. Pour moi c’est inconcevable. Donc c’est vrai qu’au détour de ce roman là, j’ai voulu remettre un petit peu la lumière sur le boulot de localier qui pour moi est un boulot à part entière. Je me considère un peu comme une agence de presse de l’information locale. On traite de la matière première qui peut ensuite être reprise par d’autres médias, et on a le devoir de bien la traiter et de bien faire notre boulot.
LCV Magazine : Dans votre livre, François Langoat est un journaliste localier de Saint-Brieuc. Vous êtes vous même breton. Quels sont vos traits de votre personnalité que l’on retrouve dans ce personnage ?
Xavier Leroux : Effectivement, je suis Breton moi-même, et originaire de Saint-Brieuc où se passe l’histoire. C’est un conseil que m’a donné le directeur de la maison d’édition. Il m’a dit que je devais ancrer l’histoire sur un territoire que les gens pourront reconnaître. J’aurais pu le faire à Niort où je vis, mais j’ai choisi Saint-Brieuc. Même si j’ai pris des libertés avec certaines choses, j’ai pris soin de le préciser au début du roman. Ce que je décris parfois dans le roman n’est pas à proprement parler sur Saint-Brieuc même, mais plutôt à côté.
Le seul trait de personnalité que François Langoat a de moi, c’est ma définition du journalisme et l’idée que je me fais de l’exercice de cette profession. Je déteste les avis tranchés. Les journalistes qui ont un avis sur tout et qui refusent de le changer, ça m’insupporte. Je préfère les avis nuancés dans les sujets. J’enfonce un peu des portes ouvertes en le disant, mais il y a des nuances partout qui doivent être considérées. À mon sens bien sûr.
Quand on demande quelle qualité est nécessaire pour devenir journaliste, on entend souvent comme réponse, la curiosité. Alors évidemment c’est quelque chose qui nous anime tous les jours. Pour moi, les deux piliers de la profession sont le sens de la nuance et la capacité d’émerveillement. Quelque soit le sujet que l’on couvre ou nos interlocuteurs, il faut trouver ce petit truc qui nous épate, nous émerveille et ça se ressent de suite dans ce qu’on écrit. Ce qu’il y a de bien dans le boulot de localier, c’est qu’en allant se coucher le soir, on se rend compte que dans la même journée on a fait un départ en retraite ou une remise de médaille du travail, et qu’on a aussi couvert la visite d’un ministre, ou interviewé des grands chefs d’entreprises. C’est ça la richesse du métier.
LCV Magazine : Parlez-nous un peu de votre maison d’édition, La Geste éditions
Xavier Leroux : C’est une maison d’édition locale assez importante dans les régions de l’Ouest. J’ai été amené à faire plusieurs articles sur leurs activités et certains de mes collègues publiaient des livres chez eux. Dans une conversation avec le directeur, Romain Naudin, je lui ai expliqué que j’avais un manuscrit en cours et que je voulais avoir son retour de professionnel. Le comité de lecture m’a demandé de modifier deux/trois choses, avec mon accord bien sûr.
Le premier grand plaisir que j’avais c’était que quelqu’un l’ait lu et me dise que c’était publiable. Même si l’histoire s’était arrêtée là, j’aurais été content. C’est très dur de se retrouver face à l’avis de lecteurs, surtout quand on n’est pas habitué.
LCV Magazine : Justement qu’en ont-ils pensé ?
Xavier Leroux : Il faut savoir que j’ai fait fort avec la parution de mon roman. Il est sorti en mars, le jour où toutes les librairies ont fermé. (rires) J’ai surtout eu le retour de mon entourage qui est forcément positif, même si ce n’est pas vrai. Donc on a deux solutions : soit on se contente de ça, soit on est objectif. Si les gens nous disent que c’est génial c’est parce qu’ils nous connaissent et qu’ils ne veulent pas se fâcher avec nous en disant que c’est un roman de « merde ». (rires)
LCV Magazine : Où peut-on se procurer votre livre ?
Xavier Leroux : Si on habite hors des Deux-Sèvres, on peut le commander sur le site de La Geste éditions ou le retrouver sur tous les sites marchands. Sinon pour ceux qui habitent dans le département, on le trouve également sur les sites des librairies locales.
LCV Magazine : Avez-vous d’autres romans en prévision ?
Xavier Leroux : Oui, je suis dans le dernier tiers d’un second roman. Ce sera encore une histoire de vengeance mais pas du tout dans le même registre. Si tout va bien, il pourrait sortir au premier semestre de 2021.
- « L’affaire Le Landec », La Geste éditions, 12,90€
- En 2018, Xavier Leroux a également signé un ouvrage sur la salle de concerts Diff’art à Parthenay (Deux-Sèvres). Un recueil composé de témoignages avec photos pour célébrer les 30 ans de cette salle.
Discussion about this post