On le sait, la France est l’un des pays référence en matière de mode. Bijoux, vêtements ou encore accessoires, de nombreux jeunes créateurs se lancent à leur propre compte et réalisent des produits faits-main. Parmi eux, Anaïs Royer et sa marque Les Rubans d’Anaïs créée en 2020, où elle propose différents accessoires pour enfants et adultes. Notre journaliste Camille Sánchez l’a rencontrée à Paris pour découvrir une jeune femme passionnée et engagée dans le Made in France et l’artisanat.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
J’ai fait un BAC pro métier de la mode et du vêtement à Dijon avant de faire un Diplôme technicien des métiers du spectacles à Lyon option habillage. Ça m’a permis d’effectuer des stages au Moulin Rouge, au théâtre de Bourges et sur le tournage de la série “Plus Belle La Vie”. Au Moulin Rouge par exemple, j’étais sur l’habillage et les retouches. Après l’obtention de mon diplôme, je suis venue à Paris et j’ai intégré l’École de la Chambre Syndicale de la Couture Parisienne (actuellement l’Institut Français de la Mode) en alternance. C’est là que j’ai fait mes premiers pas dans des maisons de couture parisiennes. Depuis, je suis intérimaire dans plusieurs maisons. Ça me permet de bouger en fonction des collections et des demandes. Le rythme est finalement un peu le même chaque année car chaque maison présente ses défilés à des dates différentes.
D’où vous vient cette passion pour la couture ?
De mon arrière-grand-mère avec qui je faisais des chaussettes en tricot et aussi de ma grand-mère paternelle pour l’aspect couture en tant que tel. Je la voyais toujours derrière sa machine à coudre et ça m’a donné envie de me lancer. J’ai donc appris à coudre avec elle pendant mon adolescence, en réalisant des serviettes de table et des accessoires.
Vous avez créé votre marque Les Rubans d’Anaïs. Quels articles proposez-vous ?
Je crée des accessoires textiles pour adultes et enfants que je vends sur la plateforme Etsy. Pour les enfants, je réalise des box de naissance composées d’un bavoir, d’une attache-tétine, d’un anneau de dentition et de trois lingettes lavables pour inciter les parents à avoir une conscience écologique. Pour les adultes, je propose des cotons lavables démaquillants, des foulchies, des totes-bags, des masques ou encore des chouchous. Ça me change de ce que je fais au quotidien dans les maisons de couture où je travaille plutôt sur des vêtements, et ça me ressemble un peu plus. De temps en temps, je crée des vêtements mais je ne peux pas m’y atteler pleinement. Si j’avais plus de temps à consacrer aux Rubans d’Anaïs, je réaliserais sans doute des collections avec des blouses, des jupes, des robes pour les fêtes, etc.
Comment choisissez-vous vos créations ?
Je tiens compte de l’avis de mes proches. Très souvent, quand on me donne une idée, je vais dans les magasins de tissus pour y repenser. Voir les tissus m’aide à me projeter.
Et quels critères prenez-vous en compte lors de votre choix ?
Principalement au coup de cœur et à la qualité. Je choisis plutôt du coton ou de la viscose et je fais attention au côté bio. Il existe un label qui s’appelle OEKO-TEX®. Il est plus respectueux pour la peau et pour l’environnement. C’est vraiment un gage de qualité et je n’utilise que des tissus ayant ce label.
Qu’est-ce qui vous a poussé à créer votre marque Les Rubans d’Anaïs ?
Je l’ai lancée en 2020, pendant le confinement, car tout le monde me demandait des masques. Pour la petite histoire, j’en faisais plein gratuitement à tous les habitants de mon quartier. Je leur ai ensuite demandé 1€ par création pour éviter les grosses commandes et que les gens comprennent aussi qu’il y a quand même du travail derrière tout ça. Et après, j’en ai livrés à plusieurs commerces que j’apprécie dans le quartier où je travaille. Par exemple Vida, le restaurant de Laury Thilleman et Juan Arbelaez.
“J’ai un peu le syndrome de l’imposteur”
Sur son compte Instagram, Laury Thilleman vous a d’ailleurs fait de la publicité
Effectivement, elle m’a contactée sur Instagram et elle a publié une story en identifiant mon compte personnel. Très vite, j’ai reçu des tonnes de messages et c’est à partir de là que je me suis dit que je devais créer une image de marque. En quelques semaines, tout était créé et j’ai repris contact avec elle, depuis mon compte pro, pour savoir si elle voulait d’autres masques. Elle en a reparlé et le soir-même, les commandes ne s’arrêtaient pas. Sur certains modèles de masques par exemple, mon stock est parti en moins de 5 minutes. Je dois tout de même avouer que j’ai un petit peu le syndrome de l’imposteur avec mes articles.
Pourquoi ?
J’ai mis longtemps avant d’indiquer le juste prix de vente de mes articles. Au tout début, j’arrivais à rembourser le tissu et je gagnais peut-être 1€ en plus et encore. J’avais envie de vendre mes produits mais j’avais peur d’avoir moins de commandes si mes prix étaient trop élevés.
Connaissez-vous le nombre de commandes que vous avez reçues depuis votre lancement ?
Au total, j’ai déjà réalisé 805 créations. Et de tous mes articles, je peux vous dire que les cotons lavables font partie de mes meilleures ventes.
Chaque nom de marque a une histoire. Quelle est la vôtre ?
Je voulais que ce soit un mélange de mes initiales et qu’il y ait un lien avec la couture. Il fallait que je trouve un ensemble de mots sympas. C’est ma maman qui m’a conseillée et qui m’a proposé Les Rubans d’Anaïs. Ce n’est pas hyper inventif mais ça m’a tout de suite parlé.
Selon vous, quels sont les avantages et les inconvénients du métier de créatrice ?
Je retrouve plus d’avantages que d’inconvénients. Je peux travailler quand je veux, depuis n’importe quel endroit, personne ne me donne d’ordres dans les choix et la confection de mes articles. Après, je dois avouer que d’un point de vue financier, chaque mois ne se ressemble pas. Ce n’est pas Noël tout au long de l’année.
Quel regard portez-vous sur la fast-fashion qui fait partie des industries les plus polluantes de notre planète ?
Je pense plein de choses sur ce sujet mais j’avoue avoir du mal à mettre des mots dessus. Je suis contre tout ça même si je dois avouer que j’en consommais avant de lancer ma marque. Depuis, j’ai réellement changé ma façon de consommer. J’essaye d’acheter plutôt du local et de faire confiance à des créatrices indépendantes. Si jamais je veux une pièce de fast-fashion, je vais regarder sur Vinted pour éviter la surproduction. Mais pour ne pas acheter ces marques-là, il faut vraiment éviter de faire les boutiques. Tout y est beau, neuf et tendance, donc forcément, ça nous incite à acheter des produits. J’avoue que même moi, je suis parfois tentée en passant devant les vitrines.
“On a beaucoup parlé du Made in France pendant la pandémie”
Depuis la pandémie de Covid, trouvez-vous que les Français consomment différemment ?
Complètement. Pour Noël dernier, j’ai par exemple eu une cliente qui m’a expliqué qu’elle préférait me donner de l’argent pour ses cadeaux, plutôt que de les dépenser dans une grande enseigne. Ce n’est pas la première fois qu’on me dit ça, et je sens que la demande du Made in France et de l’artisanat est de plus en plus forte. C’est vraiment un point que je voulais mettre en avant depuis le début et je pense que ça explique pourquoi je ne fais pas de stock.
Comment les Français peuvent-ils aider les jeunes créateurs comme vous ?
On ne voit jamais de publicité à la télévision sur un petit créateur. Ce sont toujours des grandes enseignes, donc ça pourrait être une idée pour les inciter à acheter du fait-main et local. Après, sans forcément passer par la publicité, il faut en parler davantage. Ce que je reproche, c’est qu’on a beaucoup parlé du Made in France pendant la pandémie mais depuis, plus rien. On l’a bien vu avec les masques. On a demandé à tout le monde d’en faire mais personne n’a eu d’aide. Pour toutes les personnes qui avaient une couturière dans leur entourage, ça leur paraissait normal que cette personne leur fasse des masques. Dans mon quartier par exemple, certaines personnes m’ont donné de vieux draps pour leur créer des masques. J’ai trouvé ça sympa de leur part de me fournir le tissu.
Quels sont vos futurs objectifs ?
J’ai plusieurs idées en tête. Ce qui est sûr, c’est que je veux que ma marque reste à petite échelle. Je ne veux pas que ça devienne une grande entreprise. Parfois, je me projette dans une boutique. C’est vrai que j’aimerais bien avoir un atelier et pouvoir accueillir mes clientes. Mais il y a des inconvénients à ça, comme les horaires et les jours d’ouverture. En tout cas, l’un de mes projets pour cette année 2022 serait de lancer mon site Internet.
Journaliste plurimédia, Camille Sanchez a un attachement à l’univers de la gastronomie. À l’affût des nouvelles adresses et des tendances food, elle aime vous faire découvrir les produits de nos régions et ses producteurs. Ayant plusieurs cordes à son arc, elle vous propose également des plongées dans les festivals de musique, des focus sur des séries télé et des expositions mais vous invite aussi à découvrir la pelote basque. Une véritable touche-à-tout !
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