Homme de passions et de combats, globe trotter qui n’a pas sa langue dans sa poche, Alain-Dominique Perrin n’est pas un homme comme les autres. Il aime rendre hommage à la création vivante, l’encourager et la défendre. Aujourd’hui, après avoir effectué la plus grande partie de sa carrière dans le monde du luxe, Alain-Dominique Perrin a décidé de mettre son talent, son énergie et ses convictions, dans une nouvelle aventure : les « campings-chics »… Rencontre pour essayer de découvrir ce qui fait encore courir ADP (pour les intimes) !
Votre dernière marotte : le concept du “camping chic”. Quelle drôle d’idée !
Alain-Dominique Perrin : C’est une histoire assez drôle qui m’est tombée dessus tout à fait par hasard… si toutefois le hasard existe !? J’ai une maison à Noirmoutiers depuis très longtemps avec un camping pas très loin qui n’avait rien de glamour croyez moi. Il y a quelques années, le maire est venu me voir en me disant que la concession des campings allait bientôt arriver à échéance, ce qui n’était pas pour me déplaire, n’ayant qu’une envie : le faire disparaître. Mais son idée était toute autre, il souhaitait que ce soit moi qui la reprenne. De prime abord, cela ne m’intéressait nullement et de plus ce n’était pas mon métier. Mais il a lourdement insisté me disant que de toute manière ce serait un appel d’offres et que 6 ou 7 candidats seraient mis en concurrence. Finalement j’ai cédé. J’ai embauché un jeune gars au chômage qui avait bourlingué un peu dans le loisir et l’hostellerie de plein air et nous avons discuté un long moment sur le projet que nous pourrions présenter. Je voulais une idée de qualité et écologique car ce camping existant a massacré la dune et salopé la nature depuis plus de trente ans. Nous sommes arrivés avec un projet très opposé à ce qu’il y avait, le principe étant que l’on reconstituait la dune comme elle était à l’origine, ce qui était un travail colossal car une dune est quelque chose de très fragile. Les dunes sont par définition battues par la mer et par le vent, on y plante donc pas n’importe quoi. Nous avons planté 4000 arbres, nous avons viré l’intégralité des mobiles-home qui sont pour moi des horreurs absolues qui dénaturent le paysage pour les remplacer par des « habitats » en bois et en toile. Tout ceci est mobile et peut être enlevé à souhait pour planter des arbres, préserver les biotopes, etc. J’ai également fait créer des tipis par un corse, cela m’a été inspiré par certaines photos de Curtis du début du XXe siècle, que je collectionne. Il photographiait beaucoup les indiens. Ces tipis ont séduit beaucoup de gens –y compris la presse !- et l’histoire était lancée. Aujourd’hui, on y trouve aussi des tentes de tailles diverses et ayant différents niveaux de confort. Nous travaillons beaucoup sur la notion de service et de confort tout en respectant la nature. Le camping est souvent un massacre de la nature, alors que ce que je propose est une vraie alternative au rapprochement avec la nature, tout en offrant un service de luxe à ceux qui y viennent. Point positif de cette Opération, plus de 70% des gens qui fréquentent mes campings ne sont absolument pas des adeptes du camping, mais plutôt des bobos du Sud-Ouest, de Paris, de Lyon, venus vivre une expérience en famille.
Que viennent chercher les gens dans un camping comme le votre qu’ils ne trouvent pas dans un hôtel de luxe ?
ADP : Il y a un phénomène intéressant révélé par une étude que nous avons faite, qui est que 64% des gens venus l’année dernière n’avaient jamais campé. Je pense que les gens ont besoin d’un rapprochement avec la nature sans négliger le service.
Auriez vous créé un nouveau “must” ?
ADP : Non ce n’est pas un must. C’est un nouveau concept que j’ai lancé malgré moi et qui marche très bien. Aujourd’hui ce concept se développe, je suis sur le point d’en signer un troisième comme je vous l’ai dit, et j’en ai deux autres en projets dans la région de Cahors dont un dédié au cheval.
Quelle est votre définition du luxe ?
Le luxe, je ne le définis pas. La seule chose que j’accepte de dire c’est que le luxe a une valeur relative. Le luxe étant par définition une notion personnelle, chacun trouve son luxe !
Et votre regard sur le luxe aujourd’hui ?
ADP : Je porte sur le luxe un regard bienveillant, très positif et très optimiste.. Le luxe existe depuis la nuit des temps et n’est pas prêt de s’éteindre. Depuis la révolution française, la civilisation s’est enrichie dans le monde libre. Mais, je confirme que la mode pour une grande majorité est doucement sortie du luxe. Elle s’est banalisée et est beaucoup plus prêt-à-porter que haute couture, même s’il y a encore quelques grands couturiers qui appartiennent toujours au monde du luxe au sens propre, mais nombreux d’entre eux ont rejoint la cohorte du prêt-à-porter. Je l’exprimais déjà il y a plus de 20 ans. Il était clair pour moi qu’au fil des années la mode se séparerait du luxe. La différence est aujourd’hui difficile à faire entre Zara, Mango ou Uniclo qui ont envahi le marché. Par ailleurs les quelques grands couturiers qui restent, hormis Jean-Paul Gaultier, ne sont pas français… Yves Saint Laurent est mort et ce fut l’un des derniers géants. En dehors de cela, les domaines de la joaillerie, de l’art, de l’automobile, des bateaux, de l’immobilier se sont considérablement renforcés et développés. Tous ces secteurs ne se sont jamais mieux portés. La seule condition pour pérenniser le luxe c’est la créativité, car sans création, il n’y a pas de luxe..
Vous avez, au cours de votre carrière été souvent controversé. Cela fait-il parti du jeu ?
ADP : Honnêtement, je n’en fous. Je suis controversé et c’est normal. Je n’ai pas que des amis, mais je n’ai pas beaucoup d’ennemis non plus. J’ai aussi une faculté d’indifférence, à l’envie et à la jalousie. Je suis quelqu’un de franc et de direct. Je ne pratique pas la langue de bois. Je suis un ancien rugbyman, ne l’oublions pas ! Je pense être un mec gentil mais on ne peut pas plaire à tout le monde. Je ne m’attache pas aux valeurs artificielles et superficielles. J’aime la rigolade, les soirées entre copains, la chasse – la vraie-, la voile bref : les valeurs du terroir.
Qu’est ce qui fait courir Alain-Dominique Perrin ?
ADP : Si seulement je le savais ! (rires). Je crois d’ailleurs que je ne l’ai jamais vraiment su, et c’est probablement pour cela que je suis incapable de m’arrêter. Ceci étant, ce qui me motive c’est d’entreprendre…
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