Gunkanjima, est une « île-usine » japonaise située au large de Nagasaki en mer d’Amakusa. L’accès de cette île dont le profil ressemble à celui d’un navire de guerre, est aujourd’hui interdit. Le photographe David ARNAUD a pu obtenir une autorisation spéciale pour effectuer un reportage inédit au coeur de ce désert industriel.
David Arnaud – PHOTOGRAPHIE 1 (àLE DE LOIN)
Hier, en me couchant, je savais que je n’allais pas dormir. En réalité le temps ne comptait plus. L’excitation grandissait de plus en plus. J’avais avec moi le fameux sésame : l’autorisation exceptionnelle de me rendre sur l’île de Hashima plus connue sous le nom mystérieux de Gunkanjima (Gunkanshima), ou l’île navire de guerre. Ce bout de terre au profil de bateau, se situe au large de Nagasaki. Abandonnée des hommes depuis 1973, elle est interdite au public. 03 h 45, pas besoin de réveil. Mes yeux s’ouvrent, mon coeur palpite, prêt à exploser. Ije fais le tour de mon matériel. Mon appareil photo, ma caméra, mon trépied et la carte de l’île apprise par coeur.
Ma première pensée va à la météo. La veille, tous les sites internet scandaient : » Demain, munissez vous d’un parapluie ! ». Je me lève court à la fenêtre. Miracle : le temps a l’air d’être clair. Je me prépare et descend les escaliers de mon hôtel à 04 h 21. Mon contact m’attend, digne de la ponctualité toute japonaise. Elle est accompagnée d’un représentant de la ville de Nagasaki. Il ne parle pas anglais, elle me servira de traductrice.
Nuit noire nous empruntons une route sinueuse pour atteindre un petit port au sud de la ville. Ici un bateau nous attend. Je monte à bord. Au large, je perçois une masse noire. Le bateau démarre, la nuit commence à s’effacer et les contours de l’île se précisent. Je déclenche mon appareil. Gunkanjima est là .
David Arnaud »PHOTOGRAPHIE 2 l’arche
Mon pied touche terre. Soudain mon regard est attiré par un alignement d’arches de béton. Ils servaient à acheminer un minerai extrait de l’île, depuis le point d’extraction jusqu’aux bateaux. Je remarque le cadavre d’une moto, étendu au pied de l’une de ces silhouettes géantes. Les corbeaux tournoient dans le ciel. Je décide de capter cette perspective monumentale d’où je suis, puis plus tard, en contreplongée.
David Arnaud »PHOTOGRAPHIE 3 ECOLE
Au loin, un b’timent imposant et impressionnant. C’est une école. J’imagine les cris des enfants qui déboulent dans la cour de récréation et habitent ces lieux. A travers les fenêtres aux carreaux brisés, j’aperçois les tables et les chaises des écoliers. Je prends de la distance sur le terrain vague qui fait face à l’immeuble. Je pose mon trépied et je lance une série depuis cet endroit. Les nuages sont avec moi avec des pointes éparses de ciel bleu. C’est la meilleure situation pour donner une dimension dramatique à la photo. Un ciel uniquement bleu n’aurait pas permis de donner cette profondeur à la photo.
David Arnaud »PHOTOGRAPHIE 4 VENTILATEUR
J’indique à mon contact que je souhaite trouver d’autres objets. Elle m’entraine alors vers une fenêtre isolée à travers laquelle je découvre une scène de vie sans acteur. Ou plus précisément sans vivant, car les objets de la vie quotidienne sont restés à leur place. Une télé, une tasse, un ventilateur sans son hélice. Il a perdu son ‘me. Mais pour moi il présente tous les traits que j’aime à contempler. Abimé, en partie rouillé, il raconte son histoire.
David Arnaud »PHOTOGRAPHIE 5 IMMEUBLE
A droite de l’école, un immeuble dont l’architecture compose un X. ànigmatique, il m’intrigue. C’est une des seules représentation de l’île qui circule encore, pour qui effectue des recherches bien dirigées. Ici encore, je choisis le plan large, pour photographier l’immeuble de plein pied et aussi en contreplongée. L’effet souhaité est de décupler la lourdeur de cette masse imposante.
David Arnaud »PHOTOGRAPHIE 6 CHAUSSURE et CARREAUX
Puis au détour d’une ruelle, une paire de chaussure posée sur une mosaà¯que de carrelage. Mon sujet est tout trouvé. La profondeur de champ est réduite afin de focaliser l’intérêt sur les objets au premier plan et donner un effet flou à l’arrière plan là où l’imagination trouvera son espace de jeu. Là se situe le principal objectif de ma démarche. Suggérer, puis laisser ceux qui visionneront mes photos poursuivre l’écriture de leur histoire.
EPILOGUE
La lumière devient trop forte pour les photos. Il est presque 13 heures. J’indique à mon contact que nous pouvons rentrer. Nous appelons le bateau. Il revient nous chercher. Avant de partir je saisi un caillou, je veux me souvenir. Je reviendrai. La rencontre s’est déroulée au-delà de mes espérances.
Exposition » Gunkanjima Requiem » du 02 au 27 novembre 2010 avec le soutien de la ville de Nagasaki, de Clair Paris et de l’Ambassade du Japon. ESPACE DU JAPON, 12 rue de Nancy 75010 Paris. Métro : République. Ouvert au public : du mardi au vendredi de 13h à 19h / samedi 13h à 18h ouvert au public : du mardi au vendredi de 13h à 19h / samedi 13h à 18h. www.espacejapon.com/
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